Homélie du 15 mars 2020

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Quelle est ma Soif de Dieu ?

Ex 17,3-7             Ps 94           Rm 5,1-2.5-8        Jn 4,5-42

Dans ce récit de l’Evangile, Jésus a soif, Il se fait mendiant… Il se fait mendiant du cœur de la Samaritaine et par conséquence, il se fait mendiant du cœur de l’homme. Depuis le péché originel, notre cœur n’est plus capable par lui-même de se tourner vers son créateur. Jésus qui vient nous sauver, aspire à faire jaillir de nos cœurs de pierre, l’eau Vive. Dans la première lecture nous avons eu un aperçu des cœurs endurcis : « Les fils d’Israël avaient cherché querelle au Seigneur en disant : « Le Seigneur est-il avec nous, oui ou non ? » Et pourtant de cette pierre Dieu par Moïse en fait jaillir l’eau qui sauve.

L’eau qui sauve, la Samaritaine de l’Evangile la cherche également.

Elle est rejetée par une vie dissolue qui l’a mise au banc de la société. Elle vient à l’heure la plus chaude de la journée pour assumer une corvée vitale que personne n’assume pour elle : aller puiser l’eau. Tant qu’à faire, ce n’est pas une simple bouteille d’eau qu’elle emporte mais un grand contenant qui pour l’heure est bien vide. Son cœur est à l’image du contenant : il est grand mais vide de sens, vidé par des amours qui l’ont épuisé. Elle s’épuise à puiser l’eau de la même manière qu’elle s’épuisait en amour. Elle a soif d’être aimée en vérité.

Entrons dans l’expérience du puits. Après nous être épuisé, appuyons-nous sur le Seigneur pendant ce temps de Carême et allons puiser à la source de la Vie.

Aller puiser au fond de nos puits :

Il faut reconnaître l’état de nos vies actuelles : Le cœur de l’homme s’épuise dans les désirs insensés, dans la jouissance des plaisirs immédiats. Le cœur de l’homme s’épuise quand il est déstabilisé en ce moment par la pandémie du Coronavirus. Or le cœur de l’homme est toujours en recherche du bonheur, prêt se laisser remplir. « Le puits est profond » dira la Samaritaine. Elle disait vrai : son cœur est un puits sans fond qu’elle n’ose plus imaginer être comblé. En posant son regard sur cette femme, en mendiant son cœur, Jésus l’invite à aller au plus profond d’elle même pour y découvrir la vérité de son désir le plus enfoui en elle.

Ce qui va transformer cette Samaritaine, c’est la vérité que Jésus lui révèle sur elle-même. En allant puiser dans les  profondeurs de son âme, elle redécouvre une soif de sens et de reconnaissance, une soif d’être aimée en vérité. L’a t-elle imaginer un seul instant en venant à midi au bord de ce puits de Samarie ? Elle en retourne, convertie : « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas le Messie ? »

Notre soif de sens :

Dans la crise sanitaire actuelle, notre monde exprime sa soif de sens. Le Coronavirus est si petit qu’il se glisse dans toutes nos relations et vient nous angoisser au fond de nous. Dans ce moment inquiétant, alors que tout le monde se confine, nous allons peut-être redécouvrir une soif de fraternité et de relations véritables. Alors que nous votons des lois contre la vie favorisant entre autre l’euthanasie, nous allons peut-être redécouvrir la soif de protéger nos anciens contre l’épidémie avec la soif de les sortir de l’isolement. Alors que le système scolaire est décrié par des réformes de l’apprentissage, nos jeunes vont peut-être découvrir la soif d’apprendre et la soif d’aller profiter de l’école ? Alors que nous devons jeûner de l’Eucharistie, nous allons peut-être découvrir une soif de la présence réelle de Jésus qui veut nous désaltérer! Heureux virus finalement qui nous mettra à genoux devant les plus fragiles et à genoux au plus profond de notre âme pour redécouvrir la présence de Jésus au bord de notre puits : « donne-moi à boire ». Il est la source de la vie éternelle.

Jésus a soif de nous :

Mais avant de constater que le monde gémit, comment allons-nous nous convertir en cette 3ème semaine de Carême ? Quelle est la dureté de nos cœurs de pierre qui nous empêche de laisser le Christ nous rencontrer au bord de nos puits ? Quelles sont les soifs que nous n’arrivons pas à étancher ?

Jésus a soif de nous. Cet Evangile nous invite à descendre au plus profond de nous-même pour puiser à notre tour, à la source de la vie éternelle déposée le jour de notre baptême et peut-être enfouie trop profond dans notre histoire. Dans le sacrement de la Réconciliation, la démarche individuelle proposée, nous invite à redécouvrir cette source d’eau vive qu’est le cœur miséricordieux du Père en la personne du prêtre. Par la grâce de l’Esprit Saint il prête son oreille et son cœur à Dieu qui agit au plus intime de nous-même. Tant qu’il n’y a pas ce dialogue de vérité entre le pénitent et le prêtre, il ne peut y avoir de réelle relation de confiance avec Jésus Sauveur. Il ne peut y avoir de soif désaltérée.

La Samaritaine va témoigner au monde de sa rencontre intime avec Jésus qui l’a fait descendre au plus profond d’elle-même, dans son cœur desséché de femme meurtrie. Jésus lui fait découvrir la racine de son désir, être aimée en vérité par l’Aimant, source de vie. C’est lui, Jésus, la source de Vie. Du coup, elle n’a pas peur d’aller l’annoncer dans sa ville ! Pour nous, «C’est durant de tels jours qu’il faut donner de l’espoir, qu’il faut transmettre la confiance, qu’il faut s’agenouiller pour intercéder en faveur du monde».(Mgr de Donatis, cdl de Rome)

Epuisés par nos vies en perte de sens, profitons du confinement pour nous appuyer avec foi sur le Seigneur qui a soif de nous. Ouvrons Lui notre coeur de pierre en vérité, pour qu’il en fasse jaillir la source de la Vie éternelle, « Celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif. »

Que Dieu nous bénisse en ce temps d’épreuve !

Abbé Gwenael Airault+

dimanche 15 mars 2020