Homélie pour la fête des Rameaux

5 avril 2020

Télécharger en pdf

La foule en liesse : de l’agitation au confinement, Dieu avec nous !

Mt 21,1-11 / Is 50,4-7 / Ps 21 / Ph 2,5b-11 / Mt 26,4 à 27,66

Prière d’ouverture de la messe des Rameaux : « Dieu éternel et tout puissant, pour montrer au genre humain quel abaissement il doit imiter, tu as voulu que notre Sauveur, dans un corps semblable au nôtre, subisse la mort de la croix. Accorde-nous cette grâce de retenir les enseignements de sa Passion et d’avoir part à sa résurrection. »

Dieu ne se désintéresse pas de notre condition mortelle. Il apporte le Salut à notre humanité. Ce que Jésus a subit au cours de sa Passion et dont nous allons faire mémoire tout au long de la grande Semaine Sainte a une valeur pédagogique intemporelle. Cette Semaine Sainte parle aux hommes depuis 2000ans. Or depuis 2000 ans, notre humanité vit les tribulations de son histoire qui semblent ne pas faire évoluer la Foi puisque nous constatons autour de nous la défection de la pratique religieuse, dans nos familles ou nos entourages. Ce n’est pas l’humanité qui grandit dans la foi mais c’est chacun de nous aujourd’hui qui est concerné par l’enseignement que nous allons recevoir pour vivre notre quotidien. En quoi ce mystère de la Passion du Christ nous concerne t-il encore aujourd’hui ?

S’abaisser à devenir disciple :

L’enseignement de la Passion vient nous toucher au cœur de nos confinements. Chaque jour que le bon Dieu fait, il nous comble de sa grâce. Nous en sommes plus ou moins conscients. Quoi qu’il en soit, notre vie chrétienne de baptisés, nous invite à devenir disciples-missionnaires. Disciples car chaque jour, nous cherchons à suivre le Christ. Dans ces jours de Carême, nous avons tentés et particulièrement dans le temps du confinement, de nous laisser enseigner toujours mieux par la Parole de Dieu pour comprendre et donner sens à ce que nous vivions. De cette manière en ce dimanche, dans la première lecture du livre d’Isaïe, nous lisons : « le Seigneur mon Dieu m’a donné le langage des disciples pour que je puisse d’une parole, soutenir celui qui est épuisé. » Quelle parole de vie pour nous : En ce moment d’incertitude sanitaire où chacun peut avoir la tentation de se replier sur lui-même, lorsque nous saisissons notre téléphone pour apporter un soutien moral, n’est ce pas nous laisser enseigner par le Christ, marcher à sa suite, devenir disciple pour soutenir ceux qui peinent ? Bien sûr ce n’est pas juste parce que nous sommes chrétiens que nous le faisons. Certes nous avons plus de temps, mais ce n’est pas toujours une partie de plaisir… Alors justement comme chrétiens, pouvons-nous le réaliser comme un abaissement de notre personne pour nous mettre à la hauteur de ceux qui souffrent de l’isolement. Paul dans la lettre aux Philippiens présente l’œuvre de Salut ; « le Christ ayant la condition de Dieu, s’est anéanti, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes. » Voilà qui donne sens aux paroles de consolation et d’Espérance que nous pouvons échanger.

Suivre Jésus en foule, difficile de rester fidèle.

Tout au long de sa vie apostolique jusqu’aux portes de Jérusalem, Jésus a annoncé la Bonne Nouvelle du Salut, en actes et en paroles. Les foules qui le suivent jusqu’à l’entrée à Jérusalem sont en liesse : « hosanna au Fils de David !» Quelle démonstration émotionnelle de joie ! Cependant n’est ce pas cette même foule qui va cracher sur Jésus portant sa croix dans les rues de cette même ville d’ici quelques jours ? L’émotion souvent motive les gens à vivre ensemble un événement. Ce sont de brefs élans qui retombent aussitôt. Ce qui doit nous en distinguer, c’est la fidélité à l’engagement que nous allons prendre. La foule dont nous faisions partie, qui circulaient en tous sens, se donnant ainsi l’illusion d’exister à travers ses multiples activités, a laissé place à une quiétude qui permet à chacun de s’ouvrir à la réalité fidèle de Jésus réellement présent. Suivre cette semaine Jésus sur le chemin du calvaire, c’est consentir à prendre la croix de nos incertitudes et de nos doutes pour agir fidèlement dans les petites choses du quotidien en compagnie de Jésus. C’est ainsi que l’œuvre de la grâce nous transformera petit à petit par l’amour du Christ qui ne nous abandonne pas. Bien sûr nous prions particulièrement pour ceux dont la croix s’est faite plus lourde à porter du fait de l’épidémie du coronavirus ou des incertitudes liées au travail, aux études stoppées.

L’enseignement que nous recevons de cette fête des Rameaux nous invite à nous abaisser pour rester fidèles à nos engagements de foi, loin des foules qui ne perçoivent pas encore l’œuvre de Salut à travers les signes du temps, et pour l’heure loin d’être perturbés par la dématérialisation de notre liturgie. Que le Seigneur nous ouvre ce chemin de croix irradié par son amour miséricordieux qui triomphe à la Résurrection.

Bonne Semaine Sainte !
Abbé Gwenael Airault+